Du fond de Rochebut aux sources de la Voueize : faut-il craindre la montée des cours ?

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La vidange décennale du barrage de Rochebut actuellement en œuvre, outre ses effets directs sur la valeur quantitative de l’eau disponible pour le bassin de Montluçon, devrait également nous inciter à nous pencher sur les aspects qualitatifs de l’eau retenue par cet édifice, et de voir par l’analyse des ces aspects qualitatifs, non seulement le poids des séquelles du riche passé minier de l’est-creusois mais aussi au delà d’étayer une position politique et citoyenne argumentée et solide face au projet industriel projeté pour 2020 par la société minière canadienne La Mancha.

Rochebut miné par l’arsenic

Même contenue dans un rassurant silence, il est de notoriété publique que la Tardes qui rejoint le Cher dans Rochebut, souffre d’une pollution majeure alimentée par les 550.000 tonnes de stériles du Châtelet contaminés à l’arsenic et abandonnés sans soin de 1955 à 2011. Issu de gravats soumis au phénomène de gravité, ce même poison se trouve piégé dans les sédiments du barrage, ce « bassin de décantation » dont la construction fut étonnamment contemporaine à l’ouverture de la mine de Budelière (1905 pour la mine, 1906-1909 pour le barrage). Mais plus inquiétant encore, les travaux de mise en sécurité du site minier effectués en 2011 pour un coût (à la charge de la collectivité) de 4,5 millions d’euros, ne semblent pas avoir d’effets notables selon les dernières mesures de 2014. Cette affirmation est tirée d’un tout frais rapport du SAGE Cher amont : « Au regard des résultats apportés par le suivi écologique de Rochebut et des premiers éléments d’information du projet MetMines concernant le paramètre Arsenic, ne faut-il pas interpeller l’autorité administrative sur la poursuite de la pollution de la retenue par les résidus de l’ancienne mine d’or du Châtelet ? »

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Châtelet : poinçonné sans suite ?

Un autre fait récent et loin d’être anodin doit également retenir notre attention : tel qu’on peut le lire dans le Journal Officiel, le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) n’a pas renouvelé début 2015 son droit de concession sur la « toujours » mine du Châtelet » . Quel sera le nom de l’opérateur privé qui jettera prochainement son dévolu sur ces 782 ha ? Un nouveau PER (Permis Exclusif de Recherche) est-il sur le point d’être ravi pour venir en appui à celui déjà accordé à Villeranges ?

PER pépère en bord de Voueize

Détaillons maintenant ce PER de Villeranges accordé fin 2013 à la société Cominor-La Mancha pour une durée de trois ans renouvelable. Sa superficie forte de 47,2 km² répartis sur 7 communes autour de Lussat se situe intégralement sur le bassin versant de la Voueize et de la Tardes, et donc du Cher. Il est important de rappeler que ce PER, unique voie légale pour toute obtention d’un permis d’exploitation, fait suite à un précédent PER accordé au début des années 1980 et mené durant près de 10 ans pour partie sur le même site par la Total Compagnie Minière. Ces recherches avaient alors recueilli une masse de données conséquentes caractérisant avec précision le filon notamment grâce au percement d’une galerie sous les Farges de 800m de long. Données qui, par le jeu des fusions acquisitions, sont aujourd’hui dans les mains de la société Cominor. Tout porte à penser que cette future mine n’est pas un fantasme… D’autant que la relance de l’industrie minière en hexagone, si elle a vu le jour sous la Présidence Sarkozy, continue d’être portée par une même volonté politique affirmée, en son temps par Montebourg et aujourd’hui par Macron.
Une mine à ciel ouvert à moins de trente kilomètres de Montluçon, sous les vents dominants et en amont du bassin versant. Amis de l’Allier, voilà ce qui se prépare dans votre « Far West creusois »… Assortie à très court terme de l’implantation d’une usine de cyanuration classée Seveso particulièrement gourmande en eau. Complexe qui, du fait de son caractère industriel, nécessiterait d’exploiter d’autres sources de gisements à portée de camions pour assurer sa rentabilité.

Pénurie aussi sur le bassin de Gouzon

Mais, toujours un peu plus à l’ouest, un autre élément doit encore retenir notre attention : l’approvisionnement en eau potable est déjà extrêmement critique pour la région de Gouzon. Avec à nouveau des difficultés tant sur le plan qualitatif que quantitatif. Pour y faire face, une interconnexion avec le SIVOM rive gauche du Cher est envisagée. Ainsi, dans le cadre du projet minier sur Lussat, d’aucun oserait imaginer qu’une fois l’interconnexion réalisée, il y aurait là autant de mètre-cubes laissés disponibles pour la future usine de cyanuration… Sachez dès aujourd’hui que le compte n’y sera pas ! La production des deux tonnes d’or annuelle programmée sur Lussat nécessiteraient en effet une consommation de 450.000 à 520.000 m3, soit une consommation nettement supérieure aux besoins des 18 communes alimentées par le SIAEP de Gouzon nécessitant, aujourd’hui, 360.000m3 ! Et surtout, pour quelles raisons imagine-t-on alimenter une tête de bassin depuis une eau puisée à l’aval ? Il y a là un tabou limousin qu’il nous plairait de dévoiler…

Efforts vains de préservation ?

Un dernier point encore concernant les mêmes Tardes et Voueize : celles-ci, selon un rapport du même SAGE Cher amont, subissent une pression de prélèvement importante liée à l’élevage, activité vitale pour notre bocage façonné par et pour celle-ci. L’objectif prioritaire poursuivi est de satisfaire l’alimentation en eau pour l’abreuvement en préservant les cours d’eau à l’étiage. Un programme de soutien aux éleveurs concernés est d’ailleurs en cours de réalisation et doit se prolonger jusqu’en 2021 ! Comment pourrait-on une seule seconde imaginer concilier ces objectifs avec ceux de La Mancha ?

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L’urgence d’influer le rapport de force

En conclusion, il apparaît clairement et au regard du seul paramètre « eau » que l’implantation d’une activité minière centrée sur Lussat ne doit en aucun cas être envisagée. Et nous souhaitons que l’opposition ferme et affirmée par l’ensemble des citoyens, élus, représentants et décideurs de la région, soit retransmise aux instances gouvernementales responsables avec une recommandation préfectorale les incitant à ne pas donner suite à ce dossier.

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